Elles et ils sont de plus en plus nombreux à vouloir se reconvertir dans les métiers de la cuisine. Rencontre avec des amateurs de gastronomie qui ont franchi le cap.
Photo by THERESE REYES from Burst
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Aux Fourneaux
Asma Biganzi, 34 ans, possède la fibre entrepreneuriale. Celle qui est devenue pâtissière à son compte en 2013 est d’abord passée par la case CAP. « Je travaillais dans un labo en tant que technicienne de recherche, raconte-elle. J’ai enchainé CDD et intérim pendant une dizaine d’années. Comme je ne voyais pas d’avenir dans ce domaine, je me suis dit qu’il était temps de changer de métier. Je suis une gourmande, j’adore cuisiner, alors pourquoi ne pas me former ? » Après un an au Greta en 2012, la jeune femme décroche son diplôme. Elle quitte la région Centre pour Eaubonne en Ile-de-France d’où elle a monté son projet, accompagnée par la chambre des métiers du Val d’Oise. « La plupart des personnes qui se lancent apprennent les savoir-faire et démarrent de zéro, argumente Pierrick Gobin. Ce métier est difficile, c’est pourquoi on les met en condition, dans une brigade auprès de formateurs, anciens chefs de cuisine. Les formés sont parfois surpris d’entendre souvent parler sécurité alimentaire, hygiène… Bien plus qu’à la maison, une grande rigueur s’impose aux professionnels. Malgré les lourdes contraintes, seuls 1 à 2 % des participants des formations Afpa abandonnent en cours de route. » Pour réussir à rentabiliser leur affaire, certains se diversifient. « J’ai démarré dans mon atelier en tant qu’auto-entrepreneure via Internet et Facebook pour la prise de commande, relate Asma Biganzi. En parallèle, je donne des cours de pâtisserie aux enfants depuis l’an dernier, et à présent aux adultes via les comités d’entreprise. » De son côté, Bouchra Gueddou, 46 ans, a créé son affaire à Ajaccio après avoir vécu au Maroc jusqu’à l’âge de 20 ans. Elle a d’abord exercé le métier de vendeuse dans différents domaines puis s’est occupée de personnes âgées et d’enfants. Il y a une dizaine d’années, elle a investi le secteur de la restauration gastronomique, en brigade, commis puis cheffe de parti. « Je suis passionnée de cuisine. En 2009, j’ai passé un diplôme dans la pâtisserie parce que j’avais la volonté d’ouvrir une affaire à moi. J’ai commencé à chercher un local en 2014 et j’ai ouvert l’année suivante. » Son restaurant Fleur d’Oranger propose de délicieux sandwichs à base de produits Corse tels que charcuterie et herbes. Ces blettes à la coriandre sont cuisinées au brocciu, un fromage local. Les gâteaux orientaux bénéficient des saveurs des clémentines du pays. « Rien n’est surgelé et je n’utilise aucun légume en conserve, affirme-t-elle. Je préfère les éplucher moi-même. » Elle va prochainement lancer un couscous à composer soi-même en fonction des ingrédients proposés. « Les projets qui consistent à apporter une plus-value culinaire correspondent bien aux motivations de ceux qui optent pour une nouvelle carrière dans l’alimentaire, une restauration à thème, des pizzas de qualité, une cuisine marocaine revisitée ou des projets atypiques type food trucks », commente Pierrick Gobin. Avec comme objectif pour beaucoup de produire maison et local. Ce n’est plus un métier qu’on fait par défaut comme autrefois. Et s’il s’avère difficile, la passion aide à dépasser les inconvénients inhérents propres aux activités culinaires.
Témoingnage : Sonia Dahmani fait monter la mayonnaise
Née à Gonesse et originaire de Stains, Sonia Dahmani, 33 ans, n’aurait jamais imaginé un tel parcours. Après avoir arrêté l’école à seize ans, elle a d’abord exercé des tas de boulots différents, secrétaire et vendeuse en particulier. « Quand j’étais vendeuse en boulangerie, j’ai demandé une rupture de contrat à l’amiable car une client m’avait demandé pourquoi je ne m’abîmais pas plutôt les mains pour moi ? ». Après avoir décroché le prix Talents des cités parmi les 20 meilleurs projets en France, la jeune femme est devenue traiteure à son compte. « Je cuisine depuis l’enfance. J’adore ça ! J’ai appris la cuisine orientale en Kabylie et j’aime mélanger saveurs venues d’ailleurs et tradition française. Je prépare par exemple une blanquette avec du ras el hanout à la place de l’habituel bouquet garni. J’utilise peu de matière grasse et plutôt du beurre. » Après un démarrage en douceur dans son labo, elle a repris une boulangerie à Argenteuil. Son affaire a permis de créer plusieurs emplois. « J’ai quelques cernes mais ça va bien ! », plaisante-t-elle. En parallèle, elle s’est engagée en politique. Forte de son succès, elle veut créer une école de la réussite dédiée à ceux qui ont quitté le système scolaire prématurément. Elle se dit dotée d’un moral gagnant et d’une énorme détermination. « On ne m’appelle pas Sonia l’ambitieuse pour rien ! », rit-elle. Ces délicieuses cornes de gazelle appréciées pour leur moelleux rencontrent un tel succès qu’elles seront prochainement distribuées par une enseigne de la grande distribution. Quel succès !
Les Délices de Sonia, 21 rue Ambroise Thomas à Argenteuil