Etape par étape, de la réflexion à la construction de leur projet, Olivier et Mélanie ont créé leur savonnerie dans l’Allier. Avoir mis toutes les chances de leur côté leur a réussi. Aujourd’hui, leur atelier est un succès. Témoignage.
Photo by Sarah Pflug from Burst
Olivier 47 ans et Mélanie, 42 ans, pacsés, 1 fille de 6 ans, à deux kilomètres d’un bourg de 350 habitants au cœur de l’Allier.
« Comme ma partenaire, je suis Breton. Nous avons d’abord vécu en région parisienne. Puis à Lyon, suite à une opportunité professionnelle. Responsable de l’agence lyonnaise d’une société d’ingénierie pharmaceutique, je ne me sentais plus à ma place. Il y avait de plus en plus de décalage entre mon boulot et ma philosophie personnelle. Plus les années passaient et plus je vivais mal milieu dans lequel j’évoluais, que je considérais comme pourri par l’appât du gain. J’avais besoin d’un retour à des valeurs saines. Dès 2009, tout cela a commencé à jouer sur ma santé et mon humeur. Avoir un poste à responsabilités et la rémunération n’a pas freiné mon envie de changement de vie.
L’ingénieur a décidé de changer de vie : nouveau métier, nouvelle région !
J’ai démarré mes premières démarches en me rapprochant d’un pour l’accueil en Auvergne. On ne voulait pas aller dans un endroit qui se meurt. Quand on a remarqué que le secteur de Bourbon-l’Archambault (03) était dynamique, on a fait ce choix. Monitrice éducatrice de métier, Mélanie a cherché un poste auprès d’enfants handicapés dans la région. En 2010, grâce à la revente de notre maison, nous avons pu en acheter une autre et investir pour installer la savonnerie dans les dépendances, tout cela en diminuant le montant de notre emprunt. Trois semaines après notre arrivée, Mélanie a décroché un emploi à Moulins, à une vingtaine de kilomètres de chez nous. De mon côté, comme j’évoluais dans le secteur de la pharmacie et de la cosmétologie et qu’à titre personnel, je fabriquais déjà savon et dentifrice, j’ai eu l’idée de créer une savonnerie bio alors que je travaillais encore dans mon ancienne société. J’avais envie de faire quelque chose d’utile et dont je sois fier. Je souhaitais que mon métier corresponde à mes convictions écologiques et mettre l’humain au centre de mon activité. Quoi de mieux pour cela qu’un produit de base comme le savon fabriqué dans une optique bio et solidaire ?
Changer de voie : le salaire baisse mais plaisir de réussir
Comme ce changement de métier s’accompagnait aussi d’une très forte diminution de niveau de vie, nous avons mis du temps à sauter le pas. J’ai conservé mon job à Lyon pendant six mois. Le soir, je logeais chez l’habitant. En parallèle, durant mon temps libre, j’ai mené des démarches afin de vérifier la viabilité du projet. Nous sommes venus à plusieurs reprises été comme hiver avant d’arrêter notre décision. On a repéré commerces, médecins et autres commodités. On a pris contact avec les institutions locales, on a posé des tas de questions et on s’est fait accompagner par la structure locale d’accueil. Ce rythme était difficilement tenable. Après une longue journée de travail, j’avais du mal à retrouver de la motivation pour travailler efficacement sur le business plan et tous les documents nécessaires pour aller démarcher les organismes bancaires. Six mois plus tard, j’ai négocié une rupture conventionnelle et quitté l’entreprise. J’ai du trouver des financements par d’autres biais que les banques qui me regardaient avec mépris. J’ai acheté les équipements et les matières premières au fur et à mesure des rentrées d’argent. Puis j’ai commencé à produire mes premiers savons en mars 2012.
Changer de métier et de région était le bon choix
Dès la première année nous avons été récompensé par l’obtention de la mention « Nature et Progrès ». C’était une vraie fierté et ça m’a regonflé à bloc pour le développement de la structure. Coté finance, cette première année a été plutôt catastrophique. Suite à quelques erreurs de débutants – choix des emballages, des fournisseurs… – nous avons perdu beaucoup de temps. Quelque mois après le lancement, les choses ont bien évoluées. J’ai cherché par tous les moyens à faire connaitre mes savons et nous avons eu quelques passages télé remarqués dans des émissions de télévision notamment. Cela m’a permis d’acquérir une notoriété locale. J’ai continué à investir une partie de mes maigres réserves personnelles. Les choses ont vraiment pris de l’ampleur trois ans plus tard. Je travaillais 7 jours sur 7. J’avais décidé de tenter le tout pour le tout. Avec Ludivine, mon associée, nous avons investi beaucoup d’argent dans un magasin éphémère en Bretagne puis en fin d’année nous avons sauté le pas et ouvert notre propre boutique à Paris dans le VIème arrondissement. TF1, France 4…, les retombées médiatiques ont fait décoller les ventes web et nous ont fait connaitre partout en France. Nous avons embauché une personne pour nous aider à la fabrication. Nous sommes désormais cinq à travailler à la savonnerie. Mon objectif était de rendre viable une installation à la campagne et de vivre d’une production en adéquation avec mes convictions. C’est chose faite, il ne reste plus qu’à trouver un équilibre financier. C’est en bonne voie !
Quand le chômage aide à changer de vie
Je ne pensais pas réussir à me remettre en question. J’ai beaucoup appris sur moi et aussi sur ma capacité de travail. La vie à la campagne, le changement d’échelle de valeur et la fierté d’avoir réussi à changer de vie malgré les embuches. Une période de chômage est idéale pour la remise en question et pour monter le projet qui nous tient à cœur. Néanmoins, il ne faut pas précipiter les choses. Prendre le temps de la réflexion, rencontrer les bonnes personnes, tout cela est essentiel. Il existe des territoires bien rodés et où les politiques d’accompagnement pour aider à réaliser des projets comme le mien. »
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