Suite de l’interview de la tornade Clémentine Célarié. Créative et en mouvement perpétuel, elle revendique aussi sincérité et intégrité. Attention, elle n’a pas sa langue dans sa poche et ça bouscule tous azimuts ! Elle nous livre ses états âmes en toute liberté.
TPC : Vous réagissez comment face aux obstacles ?
Quand je suis désespéré, je pleure. J’ai envie de mourir. Je m’isole complètement. Mes parents et mes enfants le savent à présent. Je me laisse glisser jusqu’au fond du puits. Je vous le conseille d’ailleurs. Je gratte bien la merde qui est sur les bords (elle rit) et là, je rebondis. Donc, en remontant, toute la merde reste bien au fond. J’ai pas mal de problèmes comme tout le monde mais je n’en parle pas. Je ne suis pas matérialiste. Si vous voyiez comment c’est chez moi. Un vrai gourbi ! (elle rit). Il n’y a que mes amis intimes qui viennent. Je ne fais jamais de dîner. D’ailleurs, je n’ai pas tellement de vie sociale. Bref, je m’égare. Donc, comme je ne suis pas matérialiste, je me fais escroquer. J’ai parfois été totalement ruinée. Je ne me protège pas assez bien. J’ai eu des gros coups durs. J’aurais pu poursuivre les gens peu scrupuleux mais je ne veux pas passer mon temps à ça. En plus, je ne suis pas rancunière hormis avec une ou deux personnes qui m’ont fait de vrais sales coups. Figurez-vous que quand vous passez à la télé, les gens croient que vous êtes au-dessus de ce genre de problème. Alors, quand on n’a pas de blé, c’est la galère. J’en parle pour que les gens sachent qu’on est comme tout le monde.
TPC : Et quand vous vous mettez à cogiter ?
Je ne vais pas chez un psy. Je me dépense physiquement. Pendant que je cours, il se passe des trucs proches de la méditation. Je gamberge et tout se décante. Je consulte aussi beaucoup mes enfants. J’ai une vie indépendante, sans mari ni entité de couple, je n’ai pas envie que mon fils aîné s’inquiète pour moi, alors on parle.
TPC : Vous doutez de vous ?
Oui et le problème est que le doute me paralyse car s’y mêle une sorte de désespoir. Je suis même parfois complètement déprimée. Notamment à cause de ce qui se passe dans notre société. Je trouve par exemple qu’on ne voit jamais de mélange de culture à la télévision. Ou qu’on ne montre qu’une Afrique qui va mal, c’est scandaleux ! Tout ça me plombe. Alors je me réfugie dans l’écriture. Pour moi, créer est une échappatoire constructive.
TPC : Comment réagissez-vous par rapport à l’évolution de la société ?
S’il y a des gens que je n’aime pas, ça ne se voit pas sauf lorsqu’on dépasse la dose. Mais je fais très attention à présent car je trouve que tout nous échappe. Comme les émissions ne sont pas en direct, tout est contrôlé. Et je veille à ce que mes propos ne soient pas manipulés. Le monde nous entraîne à être de plus en plus conventionnel. Tout est lissé et moi je déteste ça ! J’aime quand il y a des aspérités. Que ça déborde et que ça suinte de vie.
TPC : Vous souvenez-vous du slogan « Travailler plus pour gagner plus » ?
Je le trouve horrible ! Pour moi c’est travailler plus pour se trouver plus, se dépasser. Travailler plus oui, mais sûrement pas pour gagner plus. Le but de la vie n’est pas de gagner de l’argent, bordel ! Et quoi après ? La recherche du bonheur n’est pas liée à l’argent. Bien sûr qu’il faut avoir de l’argent pour vivre. D’ailleurs, les gens me disent et vous ? Et bien justement, je n’ai rien en ce moment ! Je n’ai pas la vie de quelqu’un de fortuné, je sais de quoi je parle.
TPC : On vous reproche parfois d’être démago ?
Je me moque complètement qu’on se foute de ma gueule ou qu’on pense que je suis démago. Je prends position car ce qui compte c’est d’être en accord avec sa conscience. Le public ne se trompe pas sur la sincérité de quelqu’un. Dans mon métier, ça me pose parfois des problèmes car ce n’est pas la vérité qui compte ni le talent. Il faut être politique. Alors que le public, lui, se dit « elle est encore là. Finalement elle était vraiment sincère, elle n’est pas si foldingue que ça ! » Ça c’est un peu égocentrique ! Enfin, on est là pour parler de moi (Elle rit). Non, je ne fais pas de calcul alors qu’on est dans un monde qui privilégie l’apparence. Mais le public ne s’y trompe pas !
Bio : La passion selon Clémentine
Retour en arrière. À 14 ans, les parents de Myriem alias Clémentine quittent l’Afrique, direction la France où elle va vivre pour la première fois. Douloureux changement. L’Afrique lui manque immédiatement. « Heureusement nous sommes arrivés à Lille. La ville est géniale et j’adore les gens du Nord. Ils sont super chaleureux ! » Deux ans plus tard, installation à Paris. Plus dur. Elle compense par de nombreux voyages. Elle a notamment passé plusieurs mois aux Etats-Unis avant de revenir en France suivre des cours de théâtre, de chant et de danse. Dans les années 1980, sa voix chaude lui ouvre les portes de la radio et la mène jusqu’à France Inter. Première apparition au cinéma : Garçon de Claude Sautet. Mais pour Clémentine, le véritable tournant reste 37°2 de Beineix. C’est un triomphe. Elle chante régulièrement, notamment en 2003 sur le titre Morenito de Stéphane Pompougnac et avec ses trois fils dans le spectacle Family Groove. Le théâtre lui réserve quelques beaux rôles, en particulier, le Madame Sans Gêne mis en scène par Alain Sachs. Dans la foulée, elle écrit un one woman show détonnant, Madame sans chaîne, qu’elle interprète au Café de la Gare. Aujourd’hui, elle s’illustre au théâtre et à la télévision surtout. Son franc-parler et son entrain font régulièrement fureur sur les plateaux de télé.