Top chef, Master chef et autres blogs culinaires font des émules. De plus en plus d’amateurs de gastronomie, candidats à la reconversion, optent pour un des métiers de la cuisine. Rencontre avec des toqués de bouffe.
Photo by Adrien Olichon from Burst
Qu’ils choisissent de créer un restaurant ou d’œuvrer dans un des métiers de bouche de l’artisanat, la plupart des reconvertis de fraîche date revendiquent leur amour de la cuisine et des bons produits. Saïda Harfi et Zahra Hatri sont de ceux-là. Cogérantes du Koucha Pan’s Factory, un restaurant-salon de thé implanté depuis 2014 dans le quartier de la Guérinière à Caen, elles élaborent sur place des spécialités algériennes revisitées à la mode française. « Notre koucha toasté dans un moule en forme hexagonale fabriqué spécialement, clin d’œil à la France, se compose entre autres de légumes grillés maison, explique Saïda. C’est une manière de se démarquer du Kebab et du hamburger qu’on trouve partout. » Les néo-restauratrices proposent aussi tajines, couscous, boureks, pastillas et autres pâtisseries cuisinées à leur façon. Saïda, 48 ans, ex-enseignante, est titulaire d’un doctorat de langue et culture américaine décroché en France en 2013. Elle rêve depuis longtemps d’ouvrir un restaurant. De son côté, Zahra, coiffeuse de formation a géré une superette jusqu’à un licenciement économique qui lui a offert l’occasion de se lancer. « Comme toutes les petites filles, nous avons dû apprendre les travaux ménagers et la cuisine, témoigne Saïda. Ces savoir-faire transmis par nos mères et nos grands-mères ont été adaptés à partir de produits qu’elles n’utilisaient pas, beurre salé, farine de sarrasin ou d’épeautre, etc. On adore développer de nouvelles recettes qui attirent les clients bien au-delà de la Guérinière ! »
La grande aventure
« C’est souvent parce qu’ils sont moins à l’aise dans leur vie professionnelle qu’ils décident de la remettre en cause, constate François Moutot, directeur général de l’APCMA (Assemblée permanente des chambres des métiers et de l’artisanat). Une personne sur quatre a suivi un cursus dans l’enseignement supérieur et 30 % des créateurs d’entreprise viennent d’autres horizons professionnels. Beaucoup de cadres de grandes entreprises ou du monde des affaires sont passés de la certitude à l’incertitude en matière de carrière. L’effet loupe de la télévision et des succès d’émissions dédiées à la cuisine leur a ouvert des opportunités. En outre, ces métiers semblent plus accessibles aux reconvertis car les savoir-faire s’apprennent plus facilement que ceux d’ébéniste par exemple. » La starisation des Lignac, Ducasse, et autres chefs, ou de pâtissiers et artisans médiatiques tels que Pierre Hermé ou Yves-Marie de Bourdonnec offre une visibilité à ces métiers. « De quoi amplifier le phénomène et susciter des vocations en nombre, confirme Pierrick Gobin, manager de formation de la branche restauration à l’Afpa Stains, organisme qui voit de plus en plus de candidats aux métiers de la cuisine faire acte de candidature. En général, les aspirants cuisiniers aiment faire à manger et comme leurs proches apprécient leurs préparations, ils se disent qu’ils ont peut-être un talent caché. » A noter que chaque année, les métiers de bouche (boucher, charcutier, boulanger, chocolatier-confiseur, crêpier, pâtissier, glacier, artisans restaurateurs, fromagers, etc.) attirent de plus en plus de reconvertis mais aussi de jeunes en formation initiale. « Les professionnels du secteur rencontrent de moins en moins de difficultés à recruter des candidats pour les formations, note ce dernier. Ils savent que ces métiers sont en tension et qu’il y a des débouchés. Il y a tellement de besoins que ceux qui cherchent un emploi dans le secteur en trouvent un après la formation. D’autres, et ils sont nombreux, visent la création d’entreprise. » Les professionnels des métiers de bouche et de la restauration démarrent généralement via un CAP ou un bac pro. Les candidats à une seconde carrière peuvent de leur côté bénéficier de programmes régionaux de formation. Ces métiers manquant de main d’œuvre, les financements existent. « Attention, avoir la passion pour la cuisine est importante mais il faut aussi posséder le goût de l’entreprise », précise Pierrick Gobin.
A suivre : Reconversion en cuisine 2