« Éloignez-vous de la bordure du quai », l’annonce résonne comme une douce mélodie de vacances au soleil ou de week-end au ski. Pour certains, elle n’est au contraire qu’une rengaine entendue deux fois par jour. Non, ils ne sont pas contrôleurs ! Juste pendulaires. Autrement dit, ils effectuent un trajet en train pour se rendre de leur domicile à leur lieu de travail. Ils ont choisi de partager leur temps entre ville et campagne ou Paris et province. Enquête et conseils.
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22 septembre 1981, François Mitterrand inaugure la première ligne TGV en France, qui relie Paris à Lyon. Une étape fondamentale dans l’essor des pendulaires*, ces êtres à mi-chemin entre rat des villes et rat des champs. Le principe ? Profiter des nouvelles capacités du réseau ferroviaire pour habiter en pleine campagne et travailler à Paris, par exemple. Si les liaisons courtes Amiens-Paris ou Paris-Orléans transportent depuis longtemps leur lot de pendulaires, le maillage TGV toujours plus serré multiplie l’adoption de ce mode de vie. De plus en plus d’actifs travaillent dans un bassin d’emploi autre que celui de leur résidence. L’augmentation s’élève à 17,2 % entre 1990 et 1999 et le phénomène concerne 983 871 actifs (source INSEE). Une tendance qui, selon les études, se confirme au fur et à mesure des recensement. Jeanine Marquaille, vice-présidente du Conseil régional Nord Pas-de-Calais, soulignait d’ailleurs il y a une dizaine d’années « que le TGV Nord est devenu un véritable RER entre Lille et Paris (…) les Lillois n’hésitent plus à aller travailler à Paris, les parisiens à s’installer à Lille. » De fait, cette ligne voyait déjà à l’époque chaque jour défiler 8 000 pendulaires. Aujourd’hui, avec l’ouverture des lignes TGV Méditerranée et TGV Est, quasi toutes les configurations deviennent possibles. Ainsi, dans le sens Paris-Province ça marche aussi. Ils sont sans doute moins nombreux, mais on voit émerger la nouvelle catégorie des pendulaires inversés. Tous les week-ends et les soirs de semaine, ils profitent de l’agitation Parisienne et sont très heureux de retrouver un peu de vert pendant la semaine. Paris-Reims, Paris-Vendôme, Paris-Le Mans… Autant de lignes qui comptent leur lot de voyageurs quotidiens dans ces directions, souvent issus du monde de l’enseignement et de l’université. Illustration, Tristan, attaché de presse de la Reims Management School depuis quelques mois, a ainsi réussi à trouver sa place. Chaque jour il embarque à bord du TGV Reims-Paris pour aller travailler. « Ils sont nombreux au sein de l’école à faire comme moi, explique-t-il. Finalement mon profil n’est pas si atypique. » Son conseil : habiter près de la gare. À Paris, ça évite de perdre trop de temps. Autrement dit, il est désormais de plus en plus facile de concilier vertus de la campagne et agitation urbaine.
En voiture !
Éviter les inconvénients de la ville pour mieux savourer les atouts d’une vie au vert. Une raison suffisante pour les pendulaires de franchir le cap d’un aller-retour souvent quotidien. Une bonne manière également de prendre de la distance et de mieux appréhender les avantages des deux situations. On peut toutefois devenir pendulaire pour d’autres raisons. Un rapport du ministère de l’écologie soulignait que « certains secteurs d’activité sont presque exclusivement parisiens, les perspectives y sont plus diversifiées, plus attractives (recherche, communication, médias, finance, etc.) ». Choisir de faire la navette peut donc signifier un passage obligé pour une évolution de carrière. Un semi-sacrifice qui a ses avantages. Notamment en matière de rémunération. Guy est programmiste dans une société implantée sur Paris, il fait l’aller-retour depuis Cherbourg plusieurs fois par semaine. Outre l’impression d’être en week-end dès qu’il remet les pieds dans le Cotentin, il concède que, « toutes proportions gardées, le niveau de salaire parisien dont [il] bénéficie, permet par exemple à [son] épouse de ne pas travailler. » Et de consacrer du temps à leurs deux enfants. Sans compter les autres avantages : facilité pour obtenir des places en crèche, plus grande surface habitable, jardin, etc. Ou comment avoir le beurre et l’argent du beurre… Une formule qui réserve d’ailleurs quelques avantages pour l’employeur : de nombreux pendulaires longue distance négocient une partie de leur temps de travail à domicile. Un accord qui permet à l’entreprise de faire des économies. Et oui, elle diminue les charges consacrées à vous accueillir au bureau (téléphone, ordinateur, espace). Qualité de vie, perspectives professionnelles, le tout gagnant-gagnant ?
A suivre…
*Migration pendulaire : Déplacement quotidien entre le domicile et le lieu du travail et vice-versa (Larousse encyclopédique. 1968).