À travers le témoignage de Carine Hahn, psychanalyste, coach et auteure du livre Pour nous la vie va commencer publié aux éditions Les Arènes, découvrez une réalité peu connue du grand public, celle des agences et « cabinets de conseil » dont la mission est de recueillir, d’accompagner et – rarement – de réinsérer les cadres, désormais des dizaines de milliers qui voient subitement s’effondrer leur vie, leur position, leurs privilèges… Seconde partie de son interview.
TPC : Quelles sont les différences notables entre la reconversion des cadres et celle que vivent les autres ? Et peut-on dire que les cadres ont une manière différente de l’appréhender ?
Contrairement à ce que l’on peut penser, les cadres sont confrontés aux mêmes questionnements que les autres. J’ai rencontré des personnes aux parcours extraordinaires démolies par le licenciement. La souffrance au travail, la souffrance liée à la rupture avec l’emploi touchent tout le monde aujourd’hui. Elles ne sont pas plus ou moins importantes selon le poste que l’on occupe dans l’entreprise. Elles différent d’une personne à une autre, c’est tout.
Par contre, les licenciés n’ont pas tous droit à un accompagnement vers l’emploi et qui plus est vers la reconversion. Certains se retrouvent seuls avec leurs questions et face à l’urgence économique. Ils n’ont droit qu’à un conseiller Pôle emploi débordé et souvent très peu formé, voire pas du tout, à l’accompagnement de personnes. Alors que les cadres licenciés dans le cadre d’un plan social ou d’un plan de départ volontaire partent avec une enveloppe financière, une enveloppe formation et souvent un accompagnement dans un cabinet de Ressources humaines spécialisé dans le reclassement.
TPC : Quels conseils donnez-vous à ceux qui veulent se reconvertir ?
De prendre le temps de se poser les bonnes questions. Que ne veulent-ils plus vivre dans leur vie professionnelle? Quel équilibre visent-ils entre vie personnelle, familiale et professionnelle? Quel sens a, pour eux, cette reconversion?
Leur projet doit les faire rêver, oui, mais il doit aussi être réaliste et réalisable pour que le rêve dure longtemps.
TPC : Et à ceux qui y sont contraints ?
De prendre le temps d’accuser le coup, de ne pas rester seuls avec leurs questions, et, si possible, de se faire accompagner dans le changement. Perdre un emploi, ce n’est pas la fin du monde! Mais en reprendre un trop rapidement, qui plus est s’il est quasi identique à celui d’avant, juste pour se rassurer, n’est pas la bonne solution. Pour se reconvertir, il faut avant tout accepter que la vie d’avant soit finie et qu’une nouvelle va pouvoir commencer. Souvent tellement plus belle parce que pleinement en accord avec la personne qui l’a choisie.
Oui, enfin, il y a des conseillers Pôle Emploi formés et qui prennent le temps lorsqu’ils ne sont pas débordés de converser avec le demandeur d’emploi de l’orientation tout au long de la vie ou qui amène les gens à se questionner sur leur parcours, aspirations…